Une
ouverture de temporada, couleur azur dans le ciel et autour des arènes.
Arènes
de Magescq, dimanche 16 février 2014
6 erales de la Ganaderia du Camino de Santiago pour
Louis Husson (silence, ovation)
Andres Roca Rey (deux oreilles, une oreille)
Gines Marin (ovation, ovation)
A
Magescq, ce dimanche s’est déroulé un remake de la série américaine
SLIDERS. Comme dans ce feuilleton, les personnages, à savoir, nous sont
plongés dans un univers qui ressemble à leur réalité habituelle, mais
avec des rôles ou des personnalités différentes.
Sorti de mon hibernation, j’arrive près des arènes. Comme d’habitude,
le ciel est bleu et les abords du ruedo aussi. Depuis mi aout 2013,
nous avons l’habitude de ce parterre de camionnettes, d’uniformes et
de gyrophare de couleur azur. De même que les ahuris anti corridas qui
s’époumonent à vomir leur venin d’atrabilaires font partie de la décoration
comme les poubelles et autre mobilier urbain.
J’ai commencé à me poser des questions quand j’ai vu arriver le camion
des toros et la berline de Jean-Louis Darré avec une escorte de motards
et de fourgons de la gendarmerie comme un Président de la République
en visite (sans son scooter). J’ai compris que nous étions dans un univers
parallèle quand je me suis rendu compte que les forces de l’ordre permettaient
aux antis de ne pas respecter la loi et de se livrer à des actes de
violences verbales et physiques.
Si les forces de l’ordre ont remplacé la badine par le badinage avec
les adeptes du gourou du Crac (JP Garrigues pour ne pas le nommer),
les gendarmes ont remplacé protection et attention par contraintes et
suspicion vis à vis des aficionados .
Dans ce monde là, les gens honnêtes sont contrôlés, fouillés et traités
comme des fauteurs de trouble, et les délinquants sont protégés. Les
Physiciens ont évoqué la possibilité d’anomalie de l’espace temps mais
en principe cela se produit au voisinage des trous noirs*, à moins que
nous nous approchions d’un de ces phénomènes créés non par une accumulation
de masse mais par l’accumulation conjointe de conneries humaines et
de démission des autorités.
A
l’issue de la journée le directeur de cabinet du préfet, se glorifiait
d’un équilibre trouvé entre liberté d’expression et déroulement
du spectacle. Ou il est aveugle, sourd, irresponsable, ou bien il se
trompe de scénario, Ponce Pilate ne faisant pas partie, à priori, du
casting.
Si
on en revient aux choses taurines, le bétail sélectionné par Jean Louis
Darré est la principale satisfaction du jour .Certes au niveau présentation
et comportement, il y a eu de tout, de l’excellent second, de l’encasté
cinquième aux intéressants manso con casta (1er, 4ème) en passant par
la soseria (6ème) et la mansedumbre décasté du 3 ème .
Bref de quoi passer un bon après-midi et mesurer la maturité et l’engagement
des novilleros qui leur sont opposés. Les 3 jeunes toreros de ce jour
vont passés rapidement en novillada piquée. Compte tenu de leur expérience
et de leur position à l’escalafon, ils ont été plutôt décevants. Ils
sont systématiquement passés à côté des possibilités offertes par le
bétail.
Louis Husson a semblé hors de forme et aussi de motivation, Roca Rey
s’est contenté de flatter le public avec un toreo certes élégant mais
systématiquement sur le voyage oubliant de peser sur le toro et donc
sans dominio. Gines Marin a alterné lumière et ombre, se comportant
plus comme un débutant doué que comme un becerriste confirmé qui va
bientôt monter à l’échelon supérieur.
Le
premier novillo de la temporada 2014 porte le numéro 16. Il est costaud
et cornicorto. Dès sa sortie, il accroche à gauche et charge de façon
désordonnée. Il part bien de loin et petit à petit, il va se canaliser
et s’engager avec un fond de noblesse dans la muleta de Louis Husson qui
lui servira une bonne série de derechazos. Le bicho va à mas, comme
souvent chez les Camino de Santiago, mais le torero ne suit pas . Le
Landais est hors du coup. Il toréée loin du toro et de ce fait ne le
domine pas .Au lieu de profiter d’une corne gauche abordable pour en
tirer des naturelles, il passe très vite au toreo circulaire (autrement
appelé culero), et se fait déborder par son adversaire. Le bicho a encore
des passes et de l’énergie au moment de l’estocade, Husson va pincher
trois fois avant de placer une épée de côté en avant qui aura raison
de son opposant.
Le
second (n°63), avec du trapio mais gacho, est reçu à la cape par Andres
Roca Rey. Le garçon est élégant mais ne pèse pas sur le toro, les lances
de capote étant données sur le passage. Le péruvien réalise un bon tercio
de banderilles dans une piste compliquée pour cet exercice (rectangulaire,
sans callejon et peu de burladeros pour se réfugier). Le novillo est
noble et encasté ; Il vient de loin aussi bien à droite qu’à gauche.
Comme beaucoup de torero, Roca Rey face à un toro qui charge, ne croise
pas et se contente de présenter le leurre sur le voyage. Il ne profite
pas des qualités de son adversaire et finit par reculer et toréer fuera
de cacho. Le toro peu dominé, finit par se désintéresser du combat.
Le torero est élégant, sait accrocher le public. L’estocade de côté
et en avant est rapide, trop pour être sincère (cela sent le julipié),
mais suffisamment pour abuser public et présidence .Deux oreilles injustifiées
sont accordées (tient il y a au moins un point commun entre notre monde
et cet univers parallèle).Petite pétition de vuelta pour le novillo
et premier triomphe de torero de la temporada.
Gines
Marin se met à genoux à la sortie du toril pour accueillir son premier
adversaire (n°66). Le bicho lui passe par-dessus l’épaule faisant avorter
cette tentative de puerta gayola (toujours hasardeuse quand les novillos
sortent directement du camion). Le Camino est un joli colorado qui met
bien la tête dans la capote. Il va très vite baisser de ton. Faible
et manso, il faut lui arracher les passes. Il est compliqué à toréer,
surtout que le torero oublie les fondamentaux, ne doublant pas le bicho
en début de faena. Très vite, la faena devient laborieuse et ennuyeuse.
Marin, avec une aguante certaine, passe au toreo de près. Le numéro
de porfia réveille les gradins, mais ne suffit pas à masquer le peu
d’intérêt du Camino de Santiago. Deux pinchazos et un bajonazo enlève
tout possibilité de couper une oreille. La présidence dans un sursaut
de lucidité résiste à une mini pétition. Le matador a regagné le refuge
applaudi.
On
vient de voir un manso sin casta, le quatrième becerro (n°75) se révèlera
être un manso con casta. Bien proportionné, il sera le plus léger du
lot. Husson le reçoit de façon brouillonne. Le bicho a tendance à partir
dans les tablas, mais lorsqu’il est sollicité, il vient avec noblesse
surtout à droite. Hors de forme, le protégé de Richard Millian va s’emmêler
les pinceaux. Manquant de lucidité, comme il l’avait fait lorsqu’il
était en difficulté à Hagetmau en Août dernier, il va vouloir s’imposer
en « boxant « avec le toro. Il va lui imposer des passes en force mais
sans poder . Le Darré va petit à petit prendre le dessus dominant le
torero. La fin de faena, tire-bouchonnée, est désordonnée et mise à
mort d’une épée en avant sans s’engager . Dommage car le novillo méritait
mieux surtout de la part d’un torero qui dans deux mois passera en piquée.
Le
cinquième (N° 49) est plus costaud il est bizco. Comme ses congénères,
il a été marqué en juin 2011. C’est presque un utrero (ancien nom des
toros de trois ans). Le péruvien est moyen à la cape et sauve son tercio
de banderilles par une bonne paire à la Escribano. Le toro est encasté
et noble, mais il a une tête désordonnée .Il demande une muleta autoritaire.
Hélas Roca Rey toréé sur le voyage et fait toucher sa muleta ce qui
ne corrige pas voire accentue le défaut de l’animal. Le toro est sous-exploité
malgré des qualités évidentes et la fin de faena version trémendiste
ne relève pas le niveau de la prestation du novillero sud américain.
Grosse entière d’effet très rapide et une oreille tombe du palco, le
toro méritait mieux.
Le
dernier (N° 71) n’aurait pas déparé une novillada avec picador Son gabarit
et sa capacité à se retourner vite sème la panique en piste aux deux
premiers tiers. A la muleta, il se révèle soso suivant docilement la
muleta sans présenter de réelles difficultés. Petite faena sans grande
transmission de Gines Marin qui conclue par une entière de côté.
De
cette course, il faut retenir l’excellent et courageux travail réalisé
par les organisateurs pour nous permettre d’assister à cette course,
la qualité du bétail de Jean Louis Darré. Petite déception côté des
jeunes toreros qui n’ont pas toujours su exploiter les possibilités
offertes par les novillos.
Côté
gestion des antis, les forces de l’ordre doivent se reprendre . La solution
mise en œuvre à Magescq n’est pas la bonne, et je commence à être inquiet.
En Ponce Pilate, le préfet se contente d'un système où les fauteurs
de trouble sont gentiment gourmandés et peuvent donner libre cours à
leurs petits jeux malsains et ceux qui sont dans leur droit sont parqués
et subissent désagréments et contraintes.
J'ai l'impression que les forces de l'ordre se dégonflent et que tout
va reposer sur l'implication des organisateurs (qui fût grande à Magescq)
et la capacité à accepter les contraintes de la part des aficionados.
Je vois mal le système (que le grand penseur des risques psychosociaux
KARASEK aurait décrit comme déséquilibré et générateur de stress) tenir
longtemps et en particulier dans un environnement hyper festif (et alcoolisé)
comme Vic, Alès ou autres.
A réfléchir et cela est urgent. En tout cas, pour moi, il n'y a pas
fête quand on m'impose des contraintes injustes (ou perçues comme injustes
parce que les antis n'y sont pas soumis).
Thierry
*
un trou noir n'étant formé que par du vide, il est à
craindre que l'addition d'antitaurins en produise une quantité
suffisante à la formation du dit trou noir (note d'isa du moun)
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